Quand Heidegger se plaignait d’être captif d’un camp de concentration dont l’horreur était sans commune mesure avec celle des chambres gaz

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Donatella di Cesare vient de publier, dans le Corriere de la Serra, un passage des Cahiers noirs de 1945-46 de Heidegger et qu’on croyait perdus. Ces cahiers sont accessibles en allemand grâce à la publication du volume 97 de la Gesamtausgabe.

Lisons : « La reconnaissance manquée de ce destin qui ne nous appartenait même pas, le fait de nous avoir réprimés dans notre vouloir le monde, ne serait-elle pas, pensée du point de vue du destin, une culpabilité, et une ‘culpabilité collective’ encore plus essentielle dont l’énormité ne saurait être mesurée à l’horreur des ‘chambres à gaz’, une culpabilité plus inquiétante encore que tous les crimes dont on pourrait nous accuser sur la place publique et que personne ne voudra certainement pardonner de par le futur ? Est-ce que l’on imagine que le peuple allemand et son pays sont déjà devenus un camp de concentration, un camp que ‘le monde’ n’a encore jamais ‘vu’ et que d’ailleurs ‘le monde’ ne veut pas voir, et que ce non-vouloir est encore plus volontaire que notre absence de volonté face à la dégénérescence du national-socialisme ? »

La « philofolie » de Heidegger est ici confirmée. Le peuple allemand est le peuple de l’Etre. Les crimes nazis renvoient à une culpabilité bien moindre que celle qui, après la guerre, s’attache à l’enfermement du peuple allemand, Heidegger compris, dans un camp de concentration non vu comme tel. Cette « culpabilité collective » est plus essentielle que celle qu’il faut reconnaître au peuple allemand. En bref les chambres à gaz seraient une sorte de petit détail comparativement à ce qui advient au peuple allemand après la victoire des alliés.

Heidegger montre dans ce passage jusqu’où il est allé dans l’identification de « l’esprit allemand », notamment en philosophie, avec le nazisme le plus meurtrier.

Ici le philosophe du III° Reich ne se distingue nullement de ces nazis qui dissimulent leur crime en s’érigeant en victimes. Comme les juifs se seraient en réalité « auto-anéantis » les nazis seraient les premières victimes de cet auto-anéantissement!

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