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Avoir à répondre de son droit d’être, non pas par référence à l’abstraction de quelque loi anonyme, de quelque entité juridique, mais dans la crainte pour autrui. Mon être-au-monde ou ma « place au soleil », mon chez-moi, n’ont-ils pas été usurpation des lieux qui sont à l’autre homme déjà par moi opprimé ou affamé, expulsé dans un tiers monde : un repousser, un exclure, un exiler, un dépouiller, un tuer.
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La crainte d’occuper dans le Da de mon Dasein la place de quelqu’un; incapable d’avoir un lieu – une profonde utopie. Crainte qui me vient du visage d’autrui.
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Le moi, c’est la crise même de l’être de l’étant dans l’humain. Crise de l’être, non pas parce que le sens de ce verbe aurait encore à être compris dans son secret sémantique et appellerait à l’ontologie, mais parce que moi, je m’interroge déjà si mon être est justifié, si le Da de mon Dasein n’est pas déjà l’usurpation de la place de quelqu’un.
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Emmanuel Levinas
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