Remi Brague a la tête en l’air. Enfin pas tout à fait. Très prudemment il soutient à distance le livre de Fédier. Au reste la distance fait partie de la stratégie braguienne. Tout est soigneusement filtré. Des éléments apparaissent en gros plan, d’autres sont noyés dans le lointain. Lisons la question du Figaro littéraire et la réponse de Rémi Brague :
LE FIGARO LITTÉRAIRE. – Dans votre livre sur Heidegger, paru sous la direction de Maxence Caron *, vous écrivez que le projet du penseur relevait d’une « transformation de l’homme ». Qu’entendez-vous par là ?
Rémi BRAGUE. – Cette formule n’est pas de moi, mais de Heidegger lui-même, dans ses cours de la fin des années 1920. Il est d’ailleurs encore plus radical, puisqu’il parle de « révolutionner » le concept d’homme, voire d’« attaquer » l’homme. Non en posant des bombes, mais en « libérant l’humanité dans l’homme », en replaçant celui-ci devant sa tâche : être à la hauteur de ce qu’implique l’honneur d’être homme. Cette « humanité » en l’homme est ce que Heidegger appelle le dasein, le fait d’être en sachant que l’on est, et que l’on est responsable et mortel.
La briéveté d’une notule « grand média » ne saurait excuser la distance que met Brague entre le lecteur et le nazisme. Comment ne pas aborder, ne serait-ce que comme question, le thème de la convergence entre la « révolution nationale-socialiste » et le projet « révolutionnaire » heideggérien concernant l’homme?
Les nazis aussi voulaient révolutionner le « dasein ». « Etre à la hauteur de ce qu’implique l’honneur d’être homme », phrase braguienne dans le style scout, elle pourrait hélas se voir illustrer de la pire manière par l’oeuvre du tandem Hitler-Heidegger.
Nazisme : l’honneur d’être homme, c’est être capable de faire ce qu’il faut pour préserver l’intégrité et la pureté du sang aryen. Auschwitz, en fabriquant des cadavres d’un côté, fabrique de l’autre l’homme nouveau. Le surhomme se doit d’aller jusqu’au bout de lui-même en prenant ses « responsabilités » à l’égard des sous-hommes : les détruire ou les mettre en esclavage.
Mais voilà bien le miracle du texte heideggerien : il transmue magiquement l’horreur en doctrine d’honneur. Certaines sympathies droitières valent bien, sans doute, qu’on accepte le jeu heideggerien. Il faut que Heidegger soit un réservoir immense de « philosophèmes » pragmatiquement utiles pour que la curiosité et l’interrogation philosophique s’arrêtent, tel un nuage de Tchernobyl, juste à la frontière entre le nazisme hitlérien et l’heideggérisme.
Si vous faites un pas pour comparer les territoires vous avez la police douanière sur le dos pour vous dire que c’est vous le flic, que c’est vous qui faites une police de la pensée.
On comprend pourquoi tant de soi-disants « chercheurs en vérité » tiennent à ce que les compartiments demeurent étanches.
Les auteurs de Heidegger à plus forte raison et leurs supporters, jouant de la Question heideggérienne et du mépris que celui-ci avait pour la philosophie, passent leur temps à faire en sorte que la question même d’un nazisme heideggérien n’advienne pas comme question philosophique.
L’effet du nazisme de Heidegger se laisse saisir par l’arrogance avec laquelle ils tuent la question, la caricature, la simplifie, la rende niaise, la transforme en calomnie ou en fantasme.
Pouah!
Il faut écouter l’interview de Rémi Brague et de Maxence Caron effectuée par L’Action française étudiants diffusée sur le blog de l’Action française, c’est édifiant.On voit clairement de quel côté ces gens-là se situent. N’oublions pas que Rémi Brague est un des fondateurs de Communio. Tous ces catho proheideggériens et naturellement anti Faye ont quelque chose d’assez peu chrétien dans la bouche lorsqu’ils parlent des autres. On attendait de leur part la charité et l’amour de la vérité, c’est hélas à la calomnie et à la haine qu’on a à faire. Très édifiant.
Michel Bel, 24.03.2007
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Essayer de penser avant de vous jeter sur des mots dont la seule prononciation vaut performance : la droite, l’action française, les cathos , le nazisme, Heidegger etc… Et après ça, on croit avoir tout dit? Vous ne voyez même plus que vous englobez des réalités complètement hétérogènes les unes aux autres.
Vous avez lu Heidegger, le Livre de Fédier qui déjà répondait à Farias en préface de son édition des Ecrits Politiques de Heidegger, vous savez ce qu’est l’action française ajourd’hui , ce qu’elle était dans les années 1930, la façon dont ses intellectuels percevaient la menace hitlérienne et la remilitarisation du Rhin?
Et du « catholicisme » vous savez quoi au juste ? Et du nazisme ? Et de la perception de celui-ci par celui-là? RIEN, visiblement mais cela ne vous empêche pas de jeter l’anathème sur Heidegger, Brague, les « cathos », scouts, et que sais-je encore…?
L’article va même parler d’un tandem Hitler/Heidegger et donne à ce dernier une responsabilité dans la solution finale : comme si le national socialisme se résumait à la solution finale dont la décision est postérieure de neuf ans (Wannsee) à l’année de rectorat du philosophe. Trouvez un écrit ou une action de Heidegger à l’encontre des juifs avant de polémiquer. Vous découvririez peut-être comment Heidegger a pu s’attirer les foudres du parti et comment sa situation personnelle a pu en souffrir.
Essayez de vous demander comment et pourquoi le rectorat, sa contextualisation historique (avant que Hitler prenne tout pouvoir sur le nsdap,écrasant la branche SA -vous savez une fameuse nuit,on apprend cela au collège je crois), ce que Heidegger voulait comme organisation pour l’Université compte-tenu du point où était parvenu le chemin de sa pensée sur la question du rapport science/technique/métaphysique (conférence de 1929,qu’est-ce-que la métaphysique?).
Enfin vous parlez du concept de « surhomme », voilà une notion bien étrangère aux concepts heideggériens, et même à Nietszsche dans la façon dont vous semblez l’entendre et dont l’hitlérisme la comprenait. D’ailleurs l’explication à ce sujet a lieu dès 1936 et jusqu’à la fin de la guerre dans son cours sur Nietzsche, bien avant la Kehre, de façon publique et dangereuse.
Bref, il y aurait beaucoup à dire mais cessez de réagir comme des moutons à des livres comme ceux de Faye ou autres Onfray (Freud) qui obéissent à des commandes de la FNAC pour dégommer tel ou tel monument de la pensée – comme Heidegger et toujours à partir du même angle d’attaque – aux yeux des foules qui ignoraient jusqu’à son existence et pourront désormais le ranger dans le long catalogue toujours plus fourni des fachos de service que les massmedias nous construisent et produisent.
Ainsi vous économiseriez de l’argent en vous détournant de ces best-sellers philosophiques qui se lisent comment de mauvais policiers de gare et pourriez investir dans des livres dont les auteurs (Heidegger, Brague, Fédier, Marion…) usent d’honnêté, rigueur, humilité et patience pour essayer de donner à penser à leurs lecteurs. Investissement qui pourra même se transmettre aux générations qui vous survivront quand les premières publications mentionnées achèveront leur existence dans l’humidité des caves, à caller de vieux meubles sans valeur et à entretenir rats et autres araignées malfaisantes….
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