Heidegger phénoménologue völkisch

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Heidegger est l’introducteur du nazisme dans la philosophie. Pour éviter d’accompagner chacune de ses publications d’une mise en garde critique dument argumentée on préfère injurier la thèse et limiter l’aventure nazie de Heidegger a un moment d’égarement. On met en avant le fait qu’il aurait reconnu avoir fait une « grosse bêtise »!

Un nazi de tête peut toujours dire cela! Le lecteur est pris pour un imbécile quand on lui inflige un tel négationnisme d’académie.

Soit le livre Prolégomènes à l’histoire du concept de temps. C’est un cours du semestre d’été 1925. Mein Kampf est alors un livre tout jeune et nous sommes 8 ans avant le rectorat calamiteux. Ce texte aurait donc tout pour être « pur » : une magnifique méditation post-husserlienne.

Ma note a simplement pour but d’esquisser une mise en perspective d’une lecture possible, lecture qui devrait être évidemment plus approfondie. Elle se justife par le fait que, dés lors qu’on plonge dans le texte heideggérien, on peut précisément passer à côté de la stratégie discursive de Heidegger.

On jugera le procédé grossier. Mais tel aussi Heidegger. J’ affirme ainsi que dés le commencement de son « oeuvre » Heidegger la développe sur la base d’une adhésion à l’esprit völkisch, l’ antisémitisme le plus extrêmiste compris. (Des auteurs völkisch ont « souhaité » l’extermination dés la seconde moitié du XIX° siècle. C’est  dans ce nid que l’oeuf Heidegger a été  couvé et non dans la réponse aux horreurs du goulag.)

Lisons comment, page 202 de la traduction française, Heidegger décroche de la phénoménologie :

« C’est le questionnement phénoménologique qui conduit de lui-même, conformément à sa démarche la plus intime, à la question de l’être de l’intentionnel et avant tout [je souligne] à la question du sens de l’être en général ».

Apparemment il ne se passe que du « Heidegger » : nous franchissons, il est vrai ici par un saut, l’espace qui sépare Husserl de l’ontologie qui sera exposée dans Etre et temps environ deux ans plus tard.

Ce qu’il faut reconnaître c’est que l’expression « sens de l’être » est celle dont se sert Heidegger pour opérer la jonction entre la philosophie universitaire et l’esprit völkisch.

« Etre » est le nom du Volk – du peuple – enraciné dans un paysage et que menacent toutes les puissances de déracinement. Nous sommes déjà sur le chemin qui conduit à la solution finale.

Au même endroit suivent des considérations qui « signent » Heidegger : la référence critique à Aristote et Platon et l’arche tendue en direction de Parménide. Il n’a eu de cesse, en même temps qu’il acclimatait l’hitlérisme dans la philosophie, de creuser cette carrière.

La phrase citée est exemplaire des bifurcations que Heidegger met en place dans le texte universitaire en direction de la « révolution conservative » telle que Hitler la mettra en oeuvre, antisémitisme et solution finale compris.

Dans La logique…, derniérement publiée, la différence ontologique elle-même devient le « concept » d’une sélection entre l’ontologique – le Volk… « nous sommes le peuple » – et l’ontique. Le chemin continuait à être précisément tracé.

Jamais Heidegger ne quittera ce chemin et ne le dénoncera. Il y restera fidèle jusque dans l’entretien posthume publié par le Spiegel.

En nazi parfait et rompu à la guerre symbolique il pouvait toujours, pour brouiller certaines pistes, siffloter en chemin « J’ai fait une grosse bêtise »! Tu parles!

Il n’est alors pas étonnant que le traducteur, un fidèle de Fédier, insiste sur le point signalé à la page 17 de sa préface.

« L’explication de Heidegger avec la phénoménologie, qui ne relève pas, on le voit, de la simple enquête doxographique, est destinée à faire apparaître la nécessité et même l’urgence qu’il y a à poser la question omise par la phénonémologie sous la double forme de la question de l’être de l’intentionnel et de la question de l’être en général » . (Alain Boutot).

Tel est comment, chez Gallimard, et à l’université, un texte de grande pensée est ponctué d’éléments qui font la connexion avec la tradition völkisch et sa « relève » hitlérienne, avec toutes ses « relèves » possibles.

Trois manières de refuser la thèse :

1 – On n’y croit sincérement pas.

2 – On joue le jeu du code par complicité.

3 – On la met sous le boisseau parce qu’on veut avoir la paix et continuer à parler de Heidegger comme du grand penseur du XX° siècle. Heidegger, le double spirituel de Hitler, vous n’y pensez pas! C’est impensable.

Mais ce n’est pas sans raison politique que Heidegger ne s’est pas interdit de dire qu’on ne savait pas encore ce qu’était penser.


La pensée heideggérienne est celle de la généralisation de la biopolitique d’extermination.

Et la première grande expérience de cette « pensée » – la pensée est « pensée-action » pour Heidegger – s’est terminée en 1945 avec la fermeture de l’usine d’Auschwitz.

La phrase de 1925 aura été un jalon sur la route qui a mené à elle.

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