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On aperçoit au loin la silhouette de Henry Fonda (Tom Joad) se dirigeant vers la « croisée des chemins ».
Pour le chrétien qu’est John Ford cette croisée des chemins reste ici purement horizontale et n’indique aucune transcendance. Elle est noyée dans le labyrinthe violent d’une société en crise. Même les poteaux télégraphiques, apparemment en « croix », rappellent l’horizontalité des flux de ces marchandises particulières que sont les « news » en tous genres. Et s’ils évoquent aussi les voies romaines bordées de crucifixions c’est pour indiquer que les crucifiés sont les vagabonds, les errants, les expropriés, les sans terre et les sans travail. Précisément la frêle silhouette de Tom Joad – il y a du « Job » et de l' »Adam » dans Joad… – est le seul élément à définir, avec le sol lui-même, une « vraie croix ». Tom Joad se sacrifiera pour les siens dans sa lutte contre l’injustice…
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Tom Joad est contraint de se cacher avant de monter dans la cabine au côté du chauffeur. La première impression se confirme : la priorité est au flux des marchandises. Le camion porte le numéro 83 et il est du tout dernier modèle. On peut lire le panneau « Crossroads ». Nous sommes effectivement à la croisée des chemins. Ou la civilisation du moteur – on connaît la passion de Ford pour le cheval – saura se mettre au service de l’humain ou elle l’écrasera. Certes, la machine n’est nullement responsable de la cruauté humaine et de l’indifférence. Mais les réseaux routiers et plus généralement les réseaux où circulent et naviguent des engins motorisés laissent de moins en moins de place à des modes de vie parfois frustres mais fondés sur l’indépendance. Dans ce film « entre blancs » les indiens ne sont pas les seuls à souffrir du progrès.
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Ici un bulldozer donne un « coup de main » aux « expropriateurs ».
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La trace des chenilles du bulldozer semble écraser les minces et fragiles silhouettes des expropriés. Ou, plutôt, l’expropriation transforme des êtres pleins de vie en ombres socialement errantes et faméliques. Pour éviter la mort il faudra « trouver du travail » et cela « à n’importe quel prix ».
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La famille repart, plus soudée que jamais, à la recherche d’un travail et d’un lopin de terre. Il en faut beaucoup pour dissuader de « pauvres irlandais ».
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Vaille que vaille on arrivera à bon port comme au temps de la conquête.
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Les voitures neuves et puissantes de la police.
Ce sont les « chars romains » du film.
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La silhouette du début reprend sa pérégrination solitaire. Toujours, chez John Ford, le groupe a comme un témoin en l’espèce de l’être solitaire.
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La « nef des pauvres » reprend la route, l’optimisme chevillé au corps.
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Les photogrammes sont extraits de Les raisins de la colère (1940) d’aprés un roman de John Steinbeck.
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Je n’ai pas vu le film, mais le livre est magistral.
Magnifique la 1ère photo…
« Ah la Californie! …ça doit être l’Eldorado puisqu’il y pousse des oranges! »
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