LES TROIS GRANDES EPOQUES DE MARTIN HEIDEGGER. 1/ Epoque d’une intense sympathie pour l’extrême-droite antisémite allemande. C’est l’époque de la guerre secrète > jusqu’en 1933. 2/ Epoque d’un hitlérisme déclaré et d’un militantisme nazi « en philosophie ». S’impatiente, au début, de la mise en œuvre de « l’anéantissement total » > jusqu’en 1945. C’est l’époque du vrai « tournant ». 3/ Epoque du retour à la guerre secrète mais, cette fois, avec le capital d’Auschwitz > jusqu’en 1976. Le texte posthume du Spiegel célèbre la chambre à gaz en faisant l’éloge de la direction avec laquelle le national-socialisme est allé quant au rapport de l’homme et de la technique. Heidegger « relève » ainsi le Reich effondré en célébrant secrètement l’œuvre accomplie dans les plaines de l’est et dans les camps.

Il est impératif de mettre en perspective politique la biographie intellectuelle de Martin Heidegger. Il n’y a pas d’un côté le grand philosophe et, de l’autre, le nazi convaincu. Au reste il a lui-même abandonné la philosophie, entre autres trop encline à l’universalisme, au profit de la pensée, pensée qu’il réserve, en ce qu’elle a de plus fondamental, au seul peuple allemand et arrime méticuleusement à la vision du monde nazie.

Je propose ainsi de distinguer trois grandes époques du « travail  heideggérien ».

1 – La première époque commence en 1910 à l’hommage de «l’amateur de pogroms » (Roger Pol-Droit) Abram a Santa Clara – et s’étend jusqu’en 1933, date à laquelle il adhère en effet au parti nazi. Il se livre au cours de cette période à la guerre secrète contre l’enjuivement. Il a recours à ce qu’il appelle, dans un courrier à un autre futur nazi, Bauer, des Denkname, des mots couverts. Il revendique à celui-ci d’avoir commencé cette guerre secrète avant Etre et temps. Dans le cadre de cette fiche sommaire il faut cependant souligner qu’Etre et temps marque une étape décisive en tant que sa publication est l’occasion d’une immense méprise. Le traité est reçu comme une contribution à l’élucidation, à portée universelle, de la condition humaine alors qu’il est, notamment par le choix de son vocabulaire, adressé d’abord et avant tout aux allemands en tant que formant un peuple appelé à se retrouver « soi-même » par le truchement d’une révolution conservatrice nationale et antisémite. Heidegger est en attente de Hitler. A l’arrivée de celui-ci il se taillera les moustaches conformément à celles que porte celui qu’il reconnaît comme Führer.

Le romantisme quelque peu nietzschéen de Heidegger jeune.

2 – A partir de 1933 le masque humaniste et universitaire/universel tombe et Heidegger se pense comme un travailleur dans la pensée devant soutenir le « peuple de l’être » sur la voie de sa « libération », c’est-à-dire sur la voie qui en fera, selon son « rang ontologique », un peuple-maître ayant en charge de libérer le meilleur de l’occident de la machination juive. Esclavagisme, extermination, destruction de la « littérature négative » et de l’ « art dégénéré » seront les pierres de touche du « nouveau commencement », réplique germanique, mais en mieux, du premier commencement grec. Heidegger devra abandonner le rectorat de Fribourg par excès de radicalisme et d’impatience. Il piaffe de voir s’initier le processus d’extermination de « l’ennemi intérieur incrusté sur la racine intérieure du peuple ». Il perfectionnera désormais son art d’inscrire dans le marbre de la pensée écrite et transmissible les principes fondamentaux d’une conception d’un Etat esclavagiste, raciste et qui extermine des populations entières sans commettre de crime. C’est le sens heideggérien de la « différence ontologique ». Les juifs sont du côté de l’étant ; les aryens du côté de l’être et de l’ « Ouvert ». Les juifs, et d’autres à leur suite, ne sont que des  obstacles à l’Ouvert. L’Ouvert est la métaphore de la Domination sans rivage du peuple de l’Etre. Les juifs ne retourneront pas en Egypte : ils iront d’eux-mêmes à la mort.

C’est dés 1919 que Hitler promettait l’anéantissement de la « race juive ». C’est le motif essentiel de ce mimétisme.

Tel est le vrai « tournant »… la roue de l’estre.

3 – En 1945 Heidegger devra se remettre d’une dépression puis, plus tard, de l’interdit d’enseignement qui le frappe. L’histoire veut que ce soit du côté de l’ennemi héréditaire, la France, que Heidegger trouve de quoi, par une très fine manipulation (servie par une poignée de complices), se refaire une santé de grand-penseur-pour-tous. Il est vrai que, sur le fond, et malgré la défaite militaire du Reich, il peut au moins se targuer des succès rencontrés dans les plaines de l’est et dans les camps. Une french connexion se développe – des éléments étaient en place dès les années 30 – qui permet à l’illusion de fonctionner à plein. L’histoire à venir de la philosophie devra être l’histoire d’une invraisemblable manipulation. Un criminel de masse « spirituel » assumé, virtuose du double langage, est passé et passe encore pour un trésor spirituel universel. C’est au cours de cette période que Heidegger a prévu la publication posthume pour 2014 des Cahiers noirs, théoriquement destinés à un usage strictement privé, cahiers dans lesquels sa critique du nazisme réel n’est toutefois fondée que sur un nazisme encore plus radical.

Après la guerre Heidegger s’est fait faire une copie de la veste « völkisch » portée par Hitler dans les années 30 pour une photo rupestre  « avec cabane ». Il a laissé ses moustaches repousser. Tel est le « berger de l’être ». Ses moustaches abrite celles de Hitler!

On ne peut être heideggérien sans être nazi. On ne peut se rapporter à Heidegger qu’à  vouloir déconstruire sans indulgence et illusion tout ce qui, dans son discours, le soumet à la légitimation d’une conception d’une bureaucratie étatique raciste et massivement criminelle. De celle-ci il s’en est voulu le gourou perpétuel. Aujourd’hui même Heidegger est le cheval de Troie emprunté à l’université par les partisans d’une réhabilitation (même sournoise et rampante) du nazisme, judéocide compris.

Heidegger est à Hitler ce que la pomme de douche est au gaz zyklon.

Car le grand tour de passe-passe de Heidegger repose sur un principe somme toute assez simple : une grille faussement universalisante se superpose étroitement à une grille régulant plus ou moins secrètement selon le cas  l’adresse du discours au public des seuls vrais allemands, des allemands purs et de racines avérées. Heidegger est le champion du monde, toutes catégories confondues, du racisme « spirituel » et meurtrier.

 

                  C’est la grande époque de la bergerie de l’être.

C’est l’ère de la post-vérité en philosophie, celle de la séduction spirituelle la plus trompeuse qu’on puisse imaginer.

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