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On peut comprendre pourquoi l’édition, chez Tel de Gallimard, des Questions de Heidegger ne comporte pas vraiment d’introduction critique.
On voit mal, en effet, comment le nazisme de Heidegger n’aurait pas fini par éclater dans toute son horreur et son abjection. Le Heidegger plus ou moins repenti d’après-guerre est un mythe sinistre dans lequel s’embourbe le lecteur de bonne foi.
Les titres, à eux seuls, peuvent suffire. Comment le « plus grand philosophe » du XX° siècle peut-il par exemple titrer Sérénité un discours prononcé à Messkirch 10 ans après la libération du camp d’Auschwitz? Comment ne pas comprendre, avec stupéfaction, colère et dégoût une approbation de ce que fut Auschwitz et comme le regret de sa fermeture?
C’est proprement immonde. Le « penseur » a compté sur ses passeurs français, dont certains se compromettront dans l’antisémitisme et le négationnisme, pour « transmettre » l’hitlérisme à un lectorat abusé par les hauteurs et par une spiritualité « transphilosophique ».
Heidegger est le scandale philosophique du siècle. Et les « heideggéro-académiciens » de s’entendre pour contenir la révolte.
Claude Romano, par exemple, a expédié la recherche d’Emmanuel Faye en disant que celui-ci avait raté une occasion, à savoir, avait raté l’analyse de ce qu’il en était au juste du nazisme de Heidegger.
Mais que ne la saisit-il pas lui-même, l’occasion et, au lieu de jeter la démarche dans la poubelle du « crime contre l’intelligence », se saisir de pistes confirmées pour nous donner un rendez-vous?
Tout est comme ça : l’industrie heideggérienne tourne encore trop bien, semble-t-il, pour que les « philosophes » (1) se décident à rechercher la vérité philosophique du nazisme de Heidegger.
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(1) Par « philosophes » j’entends les philosophes heideggérisés qui s’arrangent avec la critique heideggérienne de la philosophie pour justifier d’avoir à différer indéfiniment une approche « adéquate » de l’horrible vérité politique de leur filon.