L’homme à la caméra, de Dziga Vertov (1928) reste aujourd’hui la tentative la plus réussie et la plus extraordinaire d’une pensée cinématographique de la ville. Nous y reviendrons. Je voudrais simplement, dans cette note, souligner l’importance des images de sport. Et alors que s’amorce une instrumentalisation du sport en vue de l’organisation de grands spectacles de masse, Vertov met en valeur la beauté des gestes individuels. Le sport est une érotique. Et aussi une nécessité pratique. A Odessa, aprés le travail, les habitants se délassent, se rencontrent dans les clubs, soignent leur corps, vont à la plage, font du sport. Regardons par exemple ce plan :
Les jeunes filles ne répétent pas un spectacle. Elles s’entraînent à coordonner des mouvements nécessaires à la natation.
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Vertov ne filme ni la compétition, ni le spectacle de masse mais les gestes et leur poétique utilité.
Regardons :
L’homme à la caméra lui-même se rafraîchit :
Délice des bains de boue :
Et les gestes sont ceux de l’amour :
On
aimerait qu’une telle caméra veille sur les habitants d’Odessa…
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La parole est à l’auteur. Extrait du manifeste sur le ciné oeil :
"Je suis un œil / Un œil mécanique /Moi, c’est-à-dire la machine, je suis la machine qui vous montre le monde comme elle seule peut le voir / je serais libéré de l’immobilité humaine / Je suis en perpétuel mouvement / Je m’approche des choses, je m’en éloigne / Je me glisse sous elles, j’entre en elles / Je me déplace vers le mufle du cheval de course / Je traverse les foules à toute vitesse, je précède les soldats à l’assaut, je décolle avec les aéroplanes, je me renverse sur le dos, je tombe et me relève en même temps que les corps tombent et se relèvent…Voilà ce que je suis, une machine tournant avec des manœuvres chaotiques, enregistrant les mouvements les uns derrière les autres les assemblant en fatras. Libérée des frontières du temps et de l’espace, j’organise comme je le souhaite chaque point de l’univers. Ma voie, est celle d’une nouvelle conception du monde. Je vous fais découvrir le monde que vous ne connaissez pas."
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