Heidegger le dilemne

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Imaginons :

Cours sur Heidegger.

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Par ses écrits, ses gestes, ses actes, sa « pensée-action », sa complicité imaginative et fidèle avec l’hitlérisme Heidegger s’est rendu complice d’un abject crime de masse d’Etat.

Compte tenu de la menace que représente une transmission de Heidegger souvent aveugle à cet aspect de sa démarche nous ne saurions enseigner Heidegger non seulement sans condamner le plus fermement  cette complicité « pour mille ans » mais, de plus, sans interroger les liens existant entre le philosophe enseigné comme part entière du patrimoine intellectuel de l’humanité et le nazi qu’il a toujours été.

Il existe un (néo)nazisme heideggérien. Le fait de mettre à jour les significations nazies de nombreux de ses textes ne saurait être compris comme un concours involontaire à une forme de réhabilitation et de légitimation du nazisme. Il s’agit bien plutôt de mettre le lecteur en situation de responsabilité.

Il ne nous semble plus possible d’enseigner Heidegger au prix soit d’une mise hors champ totale de son « rapport » au nazisme, soit d’une minimisation de celui-ci ou, qui plus est, soit de la construction légendaire d’un Heidegger qui, tout en étant au coeur du système hitlérien, aurait eu le courage et l’intelligence, en dupant une Gestapo bien formée et aguerrie, d’être un résistant spirituel et cela pendant plus d’une dizaine d’années!

Heidegger a résisté, mais il n’a résisté qu’à la molesse ou qu’au « folklore antisémite ». Il s’est fait en réalité le promoteur d’une solution finale « propre » et « ontologique ».

Monique Canto-Sperber, dans un débat à Bibliothèque Médicis sur Heidegger, disait qu’il était grave d’accuser un philosophe. On veut bien éventuellement se reprendre et choisir résolument la cause de la pensée et de sa grandeur. Mais il est au minimum aussi grave, quand on est un philosophe, d’instrumentaliser l’aspiration à la pensée pour couvrir et justifier le crime de masse d’état. C’est Heidegger lui-même qui, ce faisant, commet un crime contre l’intelligence. Et c’est en commettre un autre que d’interdire, ne serait-ce que par intimidation, qu’on veuille en savoir plus sur le nazisme heideggérien.

Ce cours comprend trois grandes parties.

1 Qu’est-ce que le nazisme? Qu’elles ont été ses origines et ses modes de justification?

2 Le nazisme heideggérien. Ses méthodes, sa rhétorique, ses buts.

3 Essai de reprise, par un mouvement de déconstruction-reproblématisation, de questions heideggériennes laissées en suspens.

Dans la mesure où, chez Heidegger, ont coïncidé nazisme et tentative de dépassement de la philosophie – de la philosophie comme métaphysique – ce cours peut être considéré comme l’exposé d’un « degré zéro » de la philosophie, degré zéro à partir duquel peut s’esquisser une programmatique.


Auschwitz aura été le « savoir absolu » de Martin Heidegger.

Le philosophe, plus que jamais, est un Socrate mendiant.

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6 commentaires

  1. Je n’y connais rien, mais il me semble que vous vous en prenez décidément avant tout à la personne (misérable) de Martin H.
    Levinas s’en prend excellement à sa philosophie, en 1934 dans « Quelques réflexions sur la philosophie de l’hitlérisme ». Et que dire de Cassirer, dont tout l’effort consiste à ne pas céder aux sirènes du naturalisme.
    J’avais entendu une interview de George Steiner par Antoine Spire (« Barbarie de l’ignorance ») où Steiner s’était emporté contre le discrédit que Spire tentait d’imposer contre Heidegger. Et dieu sait si Steiner n’est pas un fin juge de l’Allemagne nazie. Steiner dit à peu près ceci: c’était un philosophe exceptionnel, mais c’était un tout petit homme.
    Ainsi, le mythe de la caverne est renversé. Le plus grand philosophe, illuminé par les plus belles découvertes philosophiques, revient dans le monde où vivent les hommes et embrasse les pires horreurs, parce qu’il ne voyait évidemment pas clair dans cette sombre grotte que constitue notre simple humanité.
    Sans doute c’est cela qui est le plus enrageant pour tous les philosophes: Martin H. a révélé que la philosophie, comme tout ce que l’homme fait même de plus beau, peut mener aux meurtres les plus abjects si l’action n’est pas à chaque fois repensée à nouveaux frais sans a priori « authentique » ou philosophique.

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    Réponse du phiblogZophe :

    Je vous remercie pour votre commentaire… et votre critique. Mais ma position consiste à refuser la division entre le petit homme et le grand philosophe. Il y a un projet de pérennisation du nazisme qui prend appui, avec toute la discrétion requise, sur des thémes philosophiques. Je dis simplement que c’est cela qu’il faut mettre à l’étude.

    De même qu’on clame encore qu’Heidegger n’a pas été politiquement nazi, de même on évite soigneusement une interprétation nazie – interprétation critique et de mise à l’épreuve – de beaucoup de ses textes.

    Il faut le faire. On verra après ce qui demeure d’universel dans une démarche qui ne se voulait pas « universelle »!

    J’aime bien ce que vous dites sur la caverne. Mais je maintiendrais qu’Heidegger était un platonicien nazi. Lui qui a tant parlé de l’Ouvert n’était pas aveugle ou aveuglé par la petitesse humaine. Heidegger a fabriqué un antisémitisme spirituel. L’Etre est celui des « allemands » appelés à purifier le monde des puissances d’obscurcissement. Il savait trés bien ce qu’était le nazisme et a poussé du poids de tout son prestige pour que l’antisémitisme de faits divers se transforme en génocide « propre ». (C’est surtout très clair dans La logique…) Il l’a fait en philosophe, mais en philosophe persuadé qu’il dépassait vraiment, à la différence de Hegel, la philosophie.

    Cordialement,

    Sk

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  2. Je suis bien d’accord avec vous que nous ne sommes pas quittes de ce qui a donné naissance au nazisme. La haine folle pour le multiple, l’indéterminé, la contradiction, n’a jamais été portée aussi haut que par le nazisme. Même Staline laissait aller un petit peu d’ironie autour de lui. Hitler et ses ouailles n’en toléraient aucune. Ils avaient perverti la pensée de Platon pour faire du principe de non-contradiction un fondement politique, ce qui est l’absurdité même et, en fait, la négation de la politique.
    La politique, c’est le conflit, et nous voilà entrés de plein pied dans la philosophie tout aussi dangereuse de Carl Schmitt, ce qui n’est pas plus encourageant, quant à la personne, que Heidegger…
    Je reste, de ma position d’ignorant, frappé par le respect que de très grands hommes ont eu pour Heidegger: Paul Celan, René Char, George Steiner, Paul Ricoeur et celle que j’admire le plus: Hannah Arendt. Ces faits me laissent songeur.
    Si la personne Heidegger mérite la plus sévère condamnation pour ses paroles d’adhésion au nazisme, pour ses actes antisémites notamment pendant son rectorat immonde, si le lien qu’il a tissé entre le nazisme et sa philosophie doivent faire hurler « au loup » dans la bergerie philosophique et à la trahison de la plus haute pensée, il n’en demeure pas moins que le combat d’hier, celui d’aujourd’hui et de demain, restera à jamais inachevé, je veux dire le combat pour l’humanité de l’homme. Personne n’est arrivé à consacrer dans des mots suffisamment forts cette humanité pour que de façon définitive, les hommes respectent tous les autres hommes, et c’est un fait, la pire chutes est celle où un philosophe lui-même aura adhéré à des parole de haine de l’autre homme. Avec le nazisme, et avec Heidegger dans le nazisme, nous avons assisté à cette chute source d’effroi pour moi et de révolte.
    Assurémant, cette révolte ne doit pas se tarir, jusqu’à ce que ce phénomène soit reconnu dans toute son ampleur. Alors, il sera peut-être permis de tracer une limite entre Heidegger l’innommable et Heidegger le penseur vénérable… car enfin, aucune personne, et pas même le pire criminel ou le plus saint homme, n’est fait d’une seule pièce.

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    Réponse :

    D’accord pour estimer que le combat serait celui de l’humain et de l’inhumain. Günter Anders – premier mari d’Hannah Arendt – a dit dans les années 50 que l’homme était devenu une obsolescence. Quel genre de combat faut-il alors imaginer? Le même a écrit une critique décisive de Heidegger publiée aux USA en 1948. (Anders a été un élève de Heidegger… un mauvais élève!)

    Quant à la réception de Heidegger et les noms que vous citez… Précisément ils ne doivent pas servir d’obstacle. De nouveaux textes sont parus, on en sait plus sur la politique de Heidegger. Il n’est pas ce personnage lunaire un temps égaré dans le nazisme. Il y a un vrai projet, malheureusement conforme à la thèse de « l’obsolescence ».

    Faye a raison quand il souligne l’immense danger que représente un Heidegger pétrifié dans sa posture de grand philosophe qui n’aurait été nazi que le samedi soir.

    Lisez les travaux de Mosse sur le mouvement völkisch (Les racines intellectuelles du Troisième Reich) et vous comprendrez combien Heidegger en aura été le philosophe couronné.

    La réception de Heidegger est elle-même une histoire. Nous sommes à un tournant de cette histoire.

    Sk

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  3. Votre position est importante et doit être tenue. Mais il ne faudrait pas que l’arbre cache la forêt, et qu’en se focalisant sur l’énormité de la faute d’un homme, on oublie de prêter attention au risque principal.
    Le travail de Mosse, pour ne retenir que lui, fait bien voir à quel point un mouvement de fond promu de toutes parts et comme porté par des foules anonymes a donné naissance à l’immonde bête. Qu’est-ce qui nous garantit aujourd’hui contre une telle descente aux enfers? Heidegger n’est, dans ce tableau effarant de puissance abjecte et sans nom, qu’un navrant esquif emporté comme tant d’autres dans la folie de la gloire armée.
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    L’exceptionnel ‘Journal d’un Allemand’ de Sebastien Haffner, montre bien à quel point la résistance à ce flot était exceptionnel. Le ‘LTI’ de Victor Klemperer montre à quel point un langage peut être pourri par une idéologie qui s’y immisce sans que nous y prêtions attention.
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    Ce que j’aime bien chez Günther Anders, c’est son côté désespéré et, dès lors, juste, de son ton et de ses propos. Il ne manque même pas d’un certain humour de bon aloi dans ce paysage dévasté que constitue notre époque atomique, technique et destructrice du ‘sujet’.
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    Le pire pour moi, ce serait de croire qu’en vouant aux gémonies Heidegger, ce haut voltigeur de la pensée pure, on aurait fait son boulot alors que tout reste à faire.
    Ce que vous combattez (l’oubli de l’horreur d’une pensée nazie) doit être poursuivi.
    Mais le pire, la prévention du retour parmi nous (n’est-elle pas déjà là??) d’une société totalitaire, ça doit aussi être combattu par nous tous et sans répit.

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    Réponse :

    Vous dites : « Heidegger n’est, dans ce tableau effarant de puissance abjecte et sans nom, qu’un navrant esquif emporté comme tant d’autres dans la folie de la gloire armée ». Sauf que Heidegger est le relais idéal du völkisch à l’université. Et cela peut encore être mis en action.

    Cela dit je viens de rendre visite à votre site. Je reviendrai.

    Bien à vous,

    Sk

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  4. « Alors, il sera peut-être permis de tracer une limite entre Heidegger l’innommable et Heidegger le penseur vénérable… car enfin, aucune personne, et pas même le pire criminel ou le plus saint homme, n’est fait d’une seule pièce. »

    « Heidegger le penseur vénérable ». Comme les apparences sont trompeuses! Lorsque j’ai commencé à lire Heidegger, j’ai travaillé en toute naïveté. Comme tout le monde j’ai commencé par une lecture dite « immanente ». Mais très vite j’ai été obligé de déchanter. La lecture immanente conduisait à une impasse. Tout en employant les mêmes mots que nous, Heidegger ne leur donnait pas le même sens. Ou plutôt ne donnait pas à certains le même sens, ceux qu’il appelait « les mots fondamentaux ». Heidegger ne peut être lu que si on effectue une re-sémentisation de ses textes, c’est-à-dire si on oublie le sens premier, celui du langage courant, pour ne retenir que le sens second qu’il leur donne dans son nouveau registre de sens. Cette re-sémentisation n’efface pas le sens premier, elle le recouvre, l’enveloppe verbale se trouve de ce fait sur-sémantisée à tel point que le même texte peut-être lu de deux façons différentes. Celle qui relève de la sémantique courante, celle qui relève de sa sémantique propre: la « sémantique heideggérienne ».

    Tous les mots clés de la langue allemande et de la langue philosophique ont acquis un sens nouveau chez Heidegger. Il faut dresser le registre de ce nouveau lexique car Heidegger se garde bien de le faire. La polysémie lui permet de jouer sur deux tableaux. Un tableau littéraire dans lequel « art » signifie « production de l’artiste » et « poésie » « production littéraire du poète », et un autre tableau, le tableau heideggérien dans lequel « art » signifie « activité politico-historiale du III° Reich », « intensification de la volonté de puissance » et « poésie » : « construction de l’habitat poétique », c’est-à-dire « justice » au sens nietzschéen du terme, c’est-à-dire : »construire, éliminer, anéantir ». Voilà pourquoi l’habitant de « Hütte » (c’est-à-dire de la loge aryenne, peut dire « la poésie n’est pas un jeu » et « la volonté de puissance en tant qu’art » est « l’être lui-même », ou, en d’autres termes, dans le cadre d’une vision phénoménologique hégélienne: « la patrie, c’est l’être lui-même ».

    Le mot « vérité », le mot « souci », le mot « conscience morale », le mot « Dasein », le mot « être-en-faute », le mot « phénoménologie » subissent le même sort. Quand on commence à pénétrer dans cette transposition, on change de monde. A l’univers ordinaire succède l’univers nazi. Dans la même enveloppe verbale un autre sens a été transmis. Naturellement n’accèdent à ce sens que ceux qui connaissent le registre heideggérien, c’est-à-dire les intimes de Heidegger qui sont les opérationnels du Reich. Ceux qui ont été libérés de l’esclavage de la caverne et qui ont reçu pour mission de « libérer la Terre » à leur tour, non plus seulement avec les mots mais « par le fer et par le feu ». Voilà pourquoi, Heidegger dirige à la fois la conquête militaire et le génocide. Les deux en même temps. Les ordres et les étapes de la progression sont transmis dans le langage littéraire ou philosophique courant mais le sens a totalement changé. On est passés imperceptiblement de l’écriture littéraire à l’écriture de l’histoire conformément à ce qui était indiqué dans « Être et temps » : « Philosopher sans y incorporer l’histoire est une survivance métaphysique ».

    Heidegger n’est pas un phraseur, c’est un guerrier, un chef de guerre. Le dieu Dionysos ressuscité, en acte, partant à l’assaut du ciel contre le dieu chrétien d’origine juive. Il est le « dernier dieu » dont « l’événement événementialise ». « Das Ereignis ereignet ». Afin d’effectuer sa révolution « sans retour » (1933) il tend au moment propice à ses guerriers, à son escorte, le « feu enveloppé dans l’hymne » (expression de 1936) et ses guerriers, après avoir pris de leurs mains le « feu céleste », purifient la terre par le feu afin que « la race des Allemands » se sente de plus en plus la race dominatrice du monde. Tout cela est écrit par Heidegger. Je n’invente rien. il suffit de lire ses cours sur Nietzsche et sur Hölderlin pour en avoir une conscience claire. Alors quand je vois les enseignants français se donner à fond à la lecture immanente, je me dis : comment se fait-il qu’ils soient aussi aveugles? J’en appelle alors à Spinoza et je lui dis: » Baruch, reviens! Ils ont besoin d’un bon polisseur de verres de lunettes ». Mais je ne suis pas sûr que Baruch entende. Ou s’il entend qu’il soit entendu par les « philosophes » français et leurs jurys d’agrégation.

    Heidegger est fait d’une seule pièce, n’en déplaise au commentateur précédent dont j’ai cité la remarque trop généreuse. Heidegger depuis 1910 se nomme « Dionysos contre le crucifié » « Ecce homo ». Voici l’homme. Il n’y a pas deux Heidegger. Il n’y en a qu’un, celui qui en 1910 a effectué le grand tournant par rapport au christianisme : le tournant païen génocidaire, le créateur de l’impérialisme « mystique » paranoïaque. L’adulte-enfant paraphrénique que les autres « grands enfants » « ont consacré roi » en vertu de son calme apparent (Cf. Le principe de raison). Quand on a compris cela on ne peut plus être heideggérien ou, si on veut l’être, c’est qu’on est un « collabo » participant au prétendu « salut » heideggérien tel qu’Heidegger le fit pratiquer en Europe de 1933 à 1945 « Le mal c’est le Bien » « L’homme est Dieu » (cf. son cours sur Schiller,1936 et années suivantes)., « Viens maintenant, feu ! » (1942). Compétence philosophique ne signifie pas chez lui performance philosophique. Au contraire pour lui la philosophie est terminée, maintenant commence le Reich heideggérien, le règne de Dionysos, du dernier Dionysos, la dernière figure heideggérienne du Dieu, qui, selon Nietzsche et Heidegger « vivra éternellement » grâce à « l’éternel retour ». (Cours de 1929). Bilan : 50 millions de morts et des millions d’infirmes. Dans ces conditions, la guerre peut-elle être considérée comme le « père de toutes choses », comme ne cessait de le répéter Heidegger? Pas pour moi, en tout cas.

    Michel Bel
    06.085.2008

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  5. J’ai peur que ce discours de M. Bel passe pour aboiements d’un homme en colère alors que la caravane des abominations passe et repassera encore. Un tel discours ne sera jamais un obstacle décisif à l’abomination, je le crains.
    L’ouvrage de Faye a jeté un beau pavé dans la mare. Dont acte. Les réponses n’ont pas manqué. Dont acte. Et les réponses aux réponses. A la fin on se lasse, que voulez-vous?
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    Je relisais ce soir le court texte d’honneur écrit par Hannah Arendt à l’occasion des 80 ans de M. Heidegger (publié tout à la fin et en supplément de ses ‘Vies politiques’). Arendt n’est pas un enfant de choeur, ni, quoi qu’en disent certains amateurs de romans-photos, une amante éternelle de Heidegger. Elle a écrit des choses décisives sur le totalitarisme et sur le mal politique. Elle est juive.
    Dans ce texte, après des honneurs bien dosées à celui qu’elle qualifie de ‘maître de la pensée’, elle le condamne pour son errement ‘décisif’ mais qui ne dura, écrit-elle, qu’un « court moment ».
    Elle rappelle, non sans humour et dérision, ce récit du Théétète: « l’histoire de Thalès et de la jeune paysanne thrace qui vit comment le « sage », portant le regard vers le haut pour contempler les étoiles, tomba dans un puits; elle rit de ce qu’un homme qui voulait connaître le ciel ne sût plus ce qui se trouvait à ses pieds » (H. Arendt, Vie Politiques, Tel Gallimard, p. 317). On revient à la Caverne…
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    Je suis tout à fait d’accord avec vous, l’entretien par Heidegger de ‘l’idéal völkisch’ a probablement encouragé certains aux frénésies aryennes.
    Mais comme l’écrit Arendt dans le texte que je rappelais ici, Heidegger n’a-t-il pas aussi invité chacun à effectuer l’acte de penser? Et l’acte de penser n’est-il pas l’acte le plus salutaire qui soit, dans un régime totalitaire en particulier, car il engage la personne à s’extraire de l’aliénation dans laquelle on la traine.
    Soit Arendt se trompe, et les vilipendeurs de Heidegger ont raison, soit Arendt n’a pas tort, et Heidegger n’est pas que ce Thalès ridicule et aveuglé par son ‘élan céleste’.

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    Réponse de Skildy :

    Je ne vous opposerai qu’un principe de méthode : il ne faut prendre les déclarations, fussent-elles signées par des grands noms, qu’avec beaucoup de précautions. Hannah Arendt, comme tout le monde, a commis dans sa vie un certain nombre d’erreurs d’appréciation. Il lui a fallu du temps, par exemple, pour comprendre pourquoi les juifs semblent s’être laissés « conduire à l’abattoir ».

    Je maintiens l’hypothèse : la notion heideggérienne de « pensée » est tributaire de la culture völkisch.

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  6. Désolé, M. Bel, de vous avoir blessé. Acceptez mes excuses.

    Vos propos en ce qui me concernent sont peut-être exacts.

    La pire chose qui puisse nous arriver, c’est de mourir hypnotisés par le mal qui court, autour de nous, en nous et au-dessus de nous.

    Pour s’en prévenir, il vaut la peine de prendre la mesure de la ‘légèreté de l’être’, pour reprendre les mots terribles de Kundera.

    Aboyer, j’aime bien le faire de temps en temps. C’est même salutaire, j’en suis convaincu (si cela vous en dit, allez visiter cet autre blog que je référence ci-dessous et où j’aboie de temps en temps).

    Mais ne faire qu’aboyer, ce n’est qu’accentuer une gravité qui risque de nous clouer au sol, le nez dans le guidon alors que l’air frais est (encore) là et peut être respiré gratuitement!
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    Skildy, si je vous ai également blessé, j’en suis désolé et je présente à vous aussi mes excuses.
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    Bon vent à tous!

    Et que la ‘vérité’ ne nous rejoigne pas trop vite, elle nous empêcheraient de marcher ensemble sur son chemin!

    Le Nain Ravi

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