Y-a-t’il une secte heideggéro-dasturienne?

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Existe-t-il une secte heideggéro-dasturienne?

On pourrait se poser la question en lisant le Heidegger que Françoise Dastur a publié chez Vrin.

Tout est bon chez Heidegger et il aurait même été un « critique du nazisme ». Certains heideggériens appliquent inconsciemment le procédé clairement énoncé par les nazis : plus le mensonge est gros et plus il y a des gens pour le croire. Mais, surtout, si Heidegger n’avait pas quelque peu « critiqué » le nazisme – et la notion de  « critique », s’agissant du nazisme, est-elle une notion adéquate? – il ne serait pas parvenu à être l’introducteur du nazisme dans la philosophie.

Cela dit on apprend par exemple que la théorie de l’évolution a tout faux. Heidegger, le penseur de l’Etre, l’a dit. Et l’on suit d’autant plus facilement le maître que le darwinisme a été instrumentalisé dans sa version dite « sociale » par les nazis. Mais Heidegger fait pire. Il nous sert déjà le Quadriparti (Geviert) qui n’est que la version en « grandeur et vérité interne » de la croix gammée.

Lisons Dastur : « Les êtres vivants ne sont pas engagés dans une compétition commune, comme le pense la théorie de l’évolution, qui présuppose que les étants sont de la même manière « donnés » et accessibles pour tous les animaux, l’homme inclus, qu’ils sont identiques pour eux tous et que ceux-ci ont à s’adapter à eux. La théorie de l’évolution présuppose qu’il y a une séparation entre l’animal et son environnement spécifique et considère le monde tout autant que la totalité des animaux comme une présence donnée, comme du Vorhandene. Une telle conception provient de la primauté donnée à l’attitude théorique par laquelle le Dasein oublie sa finitude constitutive et se situe « au-dessus » des étants, alors que sa situation réelle consiste à se trouve au milieu d’eux ». (F. Dastur, Heidegger, Vrin 2007 page 72).

Je ne sais pas s’il y a quelque chose à comprendre. Le Maître de la secte sème l’obscurantisme.

Ajoutons cette phrase : « La nécessaire relation de l’organisme à son environnement ne peut donc pas être comprise à partir du concept darwinien d’adaptation, qui définit cette relation comme une relation d’extériorité. » (Idem).

Les présupposés de cette objection heideggéro-dasturienne à la théorie de l’évolution permettent-ils de comprendre ce qui se passe entre les vivants et des milieux qui sont en constante évolution par exemple climatique?

Vous, moi, le chien de la voisine… nous ne sommes par exemple pas adaptés à l’atmosphère actuelle. Nous respirons de l’ontologie heideggérienne et cela suffit.

Je n’irai pas ici plus loin tant cela me paraît être d’une rare bêtise. Mais tout doit être fait, puisque la science ne pense pas, pour nous amener au Quadriparti, cette version « spirituelle » de la croix gammée. Cette « figure » de l’Etre doit être, pour la secte, la seule issue qui nous reste.

La Terre, le Ciel, les Dieux, les Mortels. Le cosmos est sacré. Et les nazis ont fait « grand oeuvre » conformément à cet Ordre du monde.

Heidegger est le Führer d’une secte qui, au minimum, entretient le mythe et le mensonge sur leur mentor.

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3 commentaires

  1. Bonjour Skildy.
    Vous vous faites bien du mal à lire ces gens. Lisez plutôt le dernier livre de R. Dadoun, Ollier et Brohm dont voici une recension par le Dr. Paul Benaim :

    http://www.guysen.com/articles.php?sid=6319

    « Heidegger, le berger du néant. Critique d’une pensée politique » , un essai de Jean-Marie Brohm, Roger Dadoun, Fabien Ollier

    Je croyais que la publication du livre d’Emmanuel Faye « Heidegger, l’introduction du nazisme dans la philosophie »(3) mettrait un terme à la polémique sur le nazisme du philosophe allemand. Cet ouvrage démontrait, preuves à l’appui, l’identité de vue entre le recteur de Fribourg (le Führer de l’université, comme il se faisait appeler) et la doctrine raciste et xénophobe du national-socialisme. Malgré la publication de ces documents accablants tirés de séminaires inédits de 1933-1935, les inconditionnels de l’ancien recteur s’obstinent à voir dans l’adhésion de Heidegger au parti nazi une « parenthèse » de courte durée ; certains trouvent même dans cette adhésion un moyen de s’opposer à Hitler ! L’un d’eux n’avait-il pas osé intituler un de ses ouvrages « Heidegger résistant » ? (4) Cet auteur a repris son texte dans l’ouvrage collectif intitulé « Heidegger à plus forte raison » publié sous la direction de François Fédier qui orchestre la contre offensive en réponse à Emmanuel Faye.(5)

    Les arguments de Jean-Marie Brohm, Roger Dadoun, Fabien Ollier dans leur essai ne seront pas tous repris ici un à un . Sans m’appesantir sur le nazisme de Heidegger, où l’essentiel a été apporté par Emmanuel Faye et ses prédécesseurs Victor Farias , Théodor Adorno et Hugo Hott, je me contenterai de citer les « points forts » de leur travail.

    Un philosophe bavard et obscur

    L’ « importance » de Heidegger ne fait aucun doute si l’on prend comme critère l’abondance de ses écrits : pas moins de 102 volumes en allemand ! Laissant loin derrière lui Descartes et son maigre « Discours de la méthode », les rares textes de Bergson et même Sartre avec son imposant traité « L’être et le néant ». Imaginons que demain un penseur de génie découvre la clé du mystère de l’univers. Lui faudra-t-il des millions de mots pour la révéler à l’humanité ?
    Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement… De toute évidence la clarté n’est pas la principale qualité de ses exposés. L’un de ses disciples et admirateurs, Hans Jonas, qui assistait à l’un de ses cours, reconnaissait « Je ne comprenais à peu prés rien de ses commentaires… » (6) Le galimatias de Heidegger aurait pu être la cible de Molière dans « Les précieuses ridicules » ou « Les femmes savantes ». A titre d’exemple de son langage hermétique, on pourrait citer le fameux « Dasein », mot intraduisible autrement que par « être-là » qui revient jusqu’à 10 fois par page dans ses écrits.

    Un philosophe nationaliste

    Interrogé par le journal Der Spiegel, Heidegger affirmait, suprême arrogance : « C’est une chose que les Français aujourd’hui me confirment sans cesse. Quand ils commencent à penser, ils parlent allemand : ils assurent qu’ils n’y arriveraient pas dans leur langue. »(7)
    De fait, note Roger Dadoun, les discours de ses fidèles sont « persillés d’expressions et tournures allemandes et même de néologismes faits de substantifs prolongés, choséité, étantité, manifesteté », inspirés de la prose de leur gourou.

    Un super négationniste

    Meurent-ils ? « Selon Heidegger, personne n’est mort dans les camps d’anéantissement, parce que personne de ceux qui y furent exterminés ne portait dans son essence la possibilité de la mort. »(5). Ces propos délirants , forme suprême du négationnisme, défient l’entendement. On croit comprendre que pour Heidegger ne meurent vraiment que ceux qui en sont dignes. Tout cela est exprimé dans le jargon qui lui est propre avec un référence permanente à l’ « essence de l’être »

    Un plagiaire séducteur

    On sait que Heidegger a été un grand séducteur, séducteur de ses étudiantes (dont Hannah Arendt). Il a été indiscutablement un orateur doué de magnétisme, admiré de ceux là-mêmes qui comme Hans Jonas ne comprenaient rien à son discours. Selon nombre d’observateurs, parmi lesquels Thomas Bernhard, auteur dramatique autrichien, « Heidegger était un camelot philosophique, qui n’a apporté sur le marché que des articles volés : tout , chez lui, est de seconde main , un charlatan qui n’a jamais fait qu’exploiter tout ce qui l’entourait ? »(8) et Ernst Jünger le décrit comme un paysan au « regard madré ».
    En clair une réussite sociale liée à son habileté et non au génie, l’équivalent de la réussite en politique d’un autre Führer qui lui aussi savait séduire les foules et dont Heidegger a été le complice.

    La sommation de J.M. Brohm

    A l’adresse de la vieille garde de Heidegger, J.M. Brohm écrit en substance : – ou bien ils ne savaient rien des positions du philosophe exprimées entre 1933 et 1966 , et dans ce cas comment osent-ils se présenter comme ses interprètes ?
    – ou bien ils taisent sciemment cette tache honteuse et dans quel but ?
    Je suis curieux d’apprendre ce que François Fédier pourrait répondre.

    Réplique par l’ironie

    Pour dissiper la rumeur superlative qui désigne en Heidegger « le plus grand penseur », Roger Dadoun recourt à l’ironie : en parodiant le style Heidegger, il mêle militarisme nazi criminel et prétention philosophique. Il avance, en passant, l’hypothèse originale selon laquelle Heidegger (fidèle à son premier livre consacré à un prédicateur autrichien antisémite) ne met en avant les Grecs anciens, dont « Héraclite l’Obscur », que pour mieux refouler les Patriarches juifs et la pensée de l’Ancien Testament, qui gravite autour de cet interdit absolu : « Tu ne tueras pas ».

    Pierre Assouline est journaliste et écrivain. Il est l’auteur de quatre romans et de dix biographies.
    Son dernier roman, Lutetia, va être prochainement adapté au cinéma

    Jean-marie Brohm est professeur de sociologie à l’université Montpellier III, directeur de la publication de la revue Prétentaine.

    Roger Dadoun est philosophe, psychanalyste et professeur émérite de littérature comparée à l’université Paris VII Jussieu.

    Fabien Ollier est doctorant en philosophie, directeur de publication de la revue Mortibus.

    Références
    1-Pierre Assouline. Le portrait Gallimard. Août 2007 312 pages
    2- Jean-Marie Brohm, Roger Dadoun, Fabien Ollier. « Heidegger, le berger du néant ». Critique d’une pensée politique». Editions homnisphères. Collection Horizon Critique 2007 185 pages
    3 – Emmanuel Faye Heidegger L’introduction du nazisme dans la philosophie Albin Michel 2005
    4 – Marcel Conche Heidegger résistant Editions de Mégare 1996
    5 – François Fédier Heidegger à plus forte raison Fayard 2007
    6- Hans Jonas Souvenirs. Bibliothèque Rivages 2005
    7- Martin Heidegger Ecrits politiques 1933-1966 Gallimard 1995
    8- Thomas Bernhard Maîtres anciens Gallimard 1998

    J. Vertummus

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  2. Sinon bien sûr pour creuser il y a le dernier livre de Meschonnic sur le sujet, qui à ce qu’il me semble poursuit des analyses déjà développées dans un précédent livre :

    http://www.fabula.org/actualites/article20589.php

    H. Meschonnic, Heidegger ou le national-essentialisme.
    Livre reçu pour Acta en attente de rédacteur
    Information publiée le vendredi 19 octobre 2007 par Marc Escola

    Heidegger ou le national-essentialisme
    Henri Meschonnic

    Paru le : 11/10/2007
    Editeur : LAURENCE TEPER
    Isbn : 978-2-916010-23-6 / Ean 13 : 9782916010236

    Ce livre travaille à une poétique et une politique de la pensée du langage et de la société.
    Il s’agit d’un critère de lecture nouveau. Le langage, l’éthique, le politique sont pensés dans leur interaction, et les deux points de vue que sont le réalisme des essentialisations et le nominalisme des individus, traditionnellement restreints à la logique, ouvrent sur leurs conséquences éthiques et politiques. Le point de départ de cette ouverture est une manière neuve de penser la Bible, non plus comme une origine mais comme un fonctionnement.
    La visée n’est pas seulement Heidegger, qui multiplie les essentialisations, elle passe par Levinas, Jaspers, Husserl, Gadamer, Leo Strauss, Hannah Arendt, Agamben, et d’autres. Réalisme et nominalisme nous concernent tous. Ce livre veut le montrer.

    J.V.

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  3. Si d’avoir été un certain temps nazi invalide toute une pensée, faites comme Foucault: Dites que vous n’avez jamais entendu parler de lui, et si vous êtes malgré cela heideggeriens vous pourrez toujours faire comme lui des aveux sur votre lit de mort.

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    Réponse de Skildy :

    Il s’agit d’abord de prendre connaissance de la nature du nazisme spirituel de Heidegger. Après on verra… Quant à Foucault je crois savoir qu’il a été influencé par Heidegger notamment par ses approches du « dispositif » (Gestell).

    Pour moi le texte heideggérien est précisément un dispositif d’introduction du nazisme dans la philosophie.

    Sk.

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